Page:Tolstoï - Anna Karénine, 1910, tome 2.djvu/417

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— Elle va bien et dîne avec ses deux sœurs.

— Tant mieux ; tiens, va vite te mettre à cette table là-bas, ici tout est pris, dit le prince en prenant avec précaution une assiettée d’ouha[1] de la main d’un domestique.

— Par ici, Levine, » cria une voix joviale du fond de la salle. C’était Tourovtzine assis près d’un jeune officier et gardant deux places qu’il destinait à Oblonsky et à Levine. Celui-ci prit avec plaisir une des chaises réservées, et se laissa présenter au jeune officier.

« Ce Stiva est toujours en retard.

— Le voici.

— Tu viens d’arriver, n’est-ce pas ? demanda Oblonsky à Levine lorsqu’il fut près de lui. Allons prendre un verre d’eau-de-vie. »

Et avant de commencer leur dîner les deux amis s’approchèrent d’une grande table sur laquelle une zakouska des plus variées était dressée ; Stépane Arcadiévitch trouva moyen néanmoins de demander un hors-d’œuvre spécial, qu’un laquais en livrée s’empressa de lui procurer.

Aussitôt après le potage on fit servir du champagne ; Levine avait faim, il mangea et but avec un grand plaisir, s’amusant de bon cœur des conversations de ses voisins. On raconta des anecdotes un peu légères, on se porta des toasts réciproques en faisant disparaître les bouteilles de champagne l’une après l’autre ; on parla chevaux, courses, et l’on

  1. Soupe au sterlet.