Page:Tolstoï - Dernières Paroles.djvu/102

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frances de son abandon avec les enfants et se décide à aller chez vous pour chercher l’aide et le conseil, de la recevoir et de la consoler. Bien qu’elle ne vous connaisse pas personnellement, elle croit en votre parole et c’est beaucoup ; je n’ai pas pu ne pas répondre à l’appel, mais je vous dis d’avance que, par ma faute, pas une famille japonaise ne sera orpheline. Oh Dieu ! comme tout cela est affreux, cruel et pénible d’abandonner tout ce qui fait sa vie, tout ce qui intéresse ! »


Voici la seconde lettre :


« Cher Léon Nicolaïevitch, un seul jour de service actif est passé, et j’ai déjà vécu une éternité de souffrances les plus terribles. Depuis huit heures du matin jusqu’à neuf heures du soir on nous a remisés et tenus dans la cour de la caserne, comme un troupeau. Trois fois s’est répétée la comédie de l’inspection du corps, et tous ceux qui se sont portés malades n’ont pu obtenir dix minutes d’attention et ont été marqués « bons ». Quand nous tous, les « bons », deux mille hommes, avons été conduits de la chancellerie aux casernes, dans la rue, sur une longueur d’une verste, il y avait une foule de parents, de mères, de femmes avec des enfants sur les bras, et si vous aviez vu et entendu