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V


On peut admettre qu’un homme ardent, animé de la vraie foi, comme Paul, ait pu ne pas comprendre absolument l’esprit de son maître, s’écarter de sa doctrine ; c’est surtout admissible pour les temps plus rapprochés. On comprend aussi que sous la pression du pouvoir de Constantin, on ait pu être entraîné par le désir d’affirmer sa foi extérieure le plus vite possible ; toutes les guerres faites dans ce but sont compréhensibles. Mais il vient un temps où il faut séparer les brebis des boucs. Ils se sont séparés d’eux-mêmes, puisqu’on ne peut plus rencontrer la vraie doctrine dans les Églises, et, aujourd’hui, il est clair que l’enseignement de l’Église — bien que né d’un très petit écart — est maintenant le pire ennemi du christianisme ; que ses partisans servent tout ce qu’ils veulent, hormis la doctrine du Christ, qu’ils nient. La doctrine de l’Église enseignante est maintenant tout à fait hostile au christianisme. En s’écartant de l’esprit de cette doctrine, elle l’a défigurée au point qu’elle la nie : au lieu de l’humilité, l’orgueil ; au lieu de la pauvreté, le luxe ; au lieu du pardon, les châtiments les plus cruels ; au lieu de l’oubli