Page:Tolstoï - Dernières Paroles.djvu/296

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ger la tête, et aussitôt tu l’as retirée. Tu vois, l’eau de la cruche n’est pas encore épuisée. As-tu compris maintenant ?

Assarkadon ne répondit rien au vieillard ; il regarda seulement le vieillard avec horreur.

— As-tu compris maintenant que Lahilié c’est toi, et que les soldats que tu as mis à mort sont aussi toi ? Et ces animaux que tu tuais à la chasse et dévorais à tes festins étaient toi. Tu pensais que la vie n’était qu’en toi, mais je t’ai délivré du voile de la tromperie et tu as vu qu’en faisant le mal aux autres tu le fais à toi-même. La vie est une en tout et tu ne manifestes en toi qu’une partie de cette vie unique ; et c’est seulement dans cette seule partie de la vie en toi, que tu peux améliorer ou empirer, augmenter ou diminuer la vie. Améliorer la vie, en toi, tu le peux seulement en détruisant les limites qui séparent ta vie de celle des autres, en considérant les autres êtres comme toi-même et les aimant. Par cela seul, tu augmenteras ta propre vie.

Au contraire, tu empires ta vie quand tu ne reconnais pour vie que ta vie propre et penses augmenter le bien de ta propre vie au détriment du bien de celle des autres. Par cela tu diminues aussi ta vie.

Et détruire la vie des autres n’est pas en ton pouvoir. La vie des êtres que tu as tués est