Page:Topffer - Nouvelles genevoises.djvu/138

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mieux. L’étrangère ? Plus vite encore. Mais une belle juive ! et puis, délaissée peut-être, mal vue des bonnes gens ! c’était à mes yeux un avantage, comme si cela l’eût rapprochée de moi.




— Veut-elle donc hébraïser ? dis-je à mon oncle Tom.

— Non, bien que je l’y aie engagée de tout mon pouvoir. Il s’agit d’un pauvre vieillard qui s’en va mourant. Elle venait m’emprunter une Bible hébraïque pour lui faire quelque lecture pieuse.

— Elle ne reviendra donc plus ?

— Demain vers dix heures, pour me rapporter le livre.

Et mon oncle se remit à examiner sa fiole, pendant que je restais à songer. — Demain, ici ; dans cette même chambre ! me disais-je. Si près de moi, sans que je lui sois rien ! pas même autant que mon oncle Tom et sa fiole ! Je redescendis tristement chez moi.




Je fus très-surpris de trouver ma chambre éclairée par une légère lueur. Ayant reconnu que c’était le reflet d’une lumière qui brillait vis-à-vis, dans la salle de l’Hôpital, ordinairement sombre à cette heure, je montai sur une chaise, d’où je vis d’abord une ombre qui se projetait contre la muraille du fond. Ma curiosité étant vivement excitée, je me guindai entre la chaise et la fenêtre, de telle façon que je pus plonger assez bas pour reconnaître, suspendu à cette même muraille, un chapeau de femme. « C’est elle ! » m’écriai-je. Mettre la chaise sur la table, Grotius et Puffendorf sur la chaise et moi sur le tout, fut l’affaire d’un clin d’œil. Et je re-