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lit, où il m’examina avec attention, pendant que je songeais à la jeune fille dont la vue venait de m’être ravie.

Mon oncle Tom était loin de se douter de la cause de mon mal. Cependant, après m’avoir anatomiquement considéré, palpé, il se convainquit, avec une certitude faisant honneur à sa science, que le squelette était en parfait état. Débarrassé de toute inquiétude à ce sujet, il s’occupa d’examiner le jeu de la respiration, celui de la circulation et de toutes les fonctions vitales ; passant ensuite aux symptômes tout à fait extérieurs, il parut enfin avoir satisfait sa curiosité, et, de l’air d’un homme qui emporte quelque chose dans sa tête pour y songer, il me quitta.




Il était environ minuit. Je restai seul avec mes idées, où je me plongeais tout entier, lorsque le roulement de l’échelle me fit tressaillir, et peu après je m’endormis.

J’étais fort agité. Mille images sans rapport avec l’objet de mes pensées se croisaient, se succédaient devant mes yeux ; ce n’était ni le sommeil ni la veille, encore moins le repos. Enfin, à ce trouble succéda l’épuisement ; et bientôt mes songes, quelque temps suspendus, revinrent et prirent une autre teinte.

Je rêvai qu’en un bois silencieux je marchais souffrant, mais pourtant calme, et l’âme pénétrée de je ne sais quel sentiment, tout plein d’un charme qui m’était inconnu. Personne d’abord, et rien de tout ce qui aurait pu me rappeler la vie ordinaire. C’était bien moi, mais doué de beauté, de grâce, de tous les avantages que je désire éveillé.

Fatigué, je m’étais assis dans une clairière solitaire. Une figure s’était approchée que je ne connaissais pas,