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J’étais donc en proie aux plus charmantes anxiétés de l’attente, lorsque vers trois heures de l’après-midi j’entendis quelqu’un monter l’escalier. La personne se dirigea d’un pas ferme vers ma porte, qu’elle ouvrit sans façon. C’était le géomètre !




Il paraît que ma physionomie n’était pas dans son état normal. — Ma visite vous fait pâlir, dit-il brusquement ; vous pouviez pourtant vous y attendre.

— Effectivement, monsieur, balbutiai-je, je m’étais flatté…

— Remettez-vous donc, et prenons des siéges.

Nous nous assîmes. — J’ai l’habitude, reprit le géomètre, d’aller droit mon chemin : voici ce qui m’amène. Puis fixant sur moi un regard étincelant de fierté : — Depuis longtemps, monsieur, vos allures me déplaisent. Je croyais m’être suffisamment mis en garde contre elles… Mais ce matin même, et en présence d’une personne tierce, vous avez compromis ma fille !… Que signifie ce manége ?

— Monsieur, tentai-je de répondre, blâmez mon inexpérience, mais ne suspectez pas mes intentions…

— Les bonnes intentions procèdent ouvertement. Or vos façons d’agir sont équivoques, quand déjà votre situation, ce que j’en sais du moins, ne me tranquillise nullement sur vos façons d’agir…

— Vous me faites outrage, monsieur ! interrompis-je avec un accent de vive émotion.

— C’est possible, reprit le géomètre d’un ton calme qui me remplit de crainte ; aussi suis-je prêt à vous faire réparation. Il se peut, en effet, que je vous juge avec sévérité. Il se peut que, timide, inexpérimenté,