Page:Topffer - Nouvelles genevoises.djvu/218

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Je rentrai tard. C’était l’heure du souper : — À table, à table ! bon oncle… J’apporte de grandes nouvelles !

— Je sais, je sais, mon enfant. La vieille me tient au courant… On parle d’écus,… un gros sac,… le Pactole tout entier qui se serait versé chez mon pauvre Jules…

— Le Pactole en personne, bon oncle. Il est dans mon poêle… Mais commençons par nous mettre à table ; car j’ai bien autre chose à vous dire !

Je remarquai que mon oncle, au lieu de relever avec gaieté ces dernières paroles en s’associant à ma joie, comme cela lui était habituel, s’était approché de la table d’un air préoccupé, et en jetant un coup d’œil du côté de la vieille, dont la présence le gênait visiblement, sans qu’il pût prendre sur lui de la congédier. Je fis un signe à Marguerite, qui se retira.

Quand nous fûmes assis à notre place accoutumée :

— C’est que j’ai aussi à te dire… reprit mon oncle. Et il toussa, comme il lui arrivait lorsque, pour exprimer quelque pénible reproche, il fallait qu’il se fît une extrême violence.

— Tu sais… Il s’arrêta, puis changeant encore de tour : — Cette bonne dame est en vérité généreuse, noble dans ses procédés !… C’est un honneur que d’être protégé par une personne d’un aussi digne cœur… un honneur qu’il faut mériter, mon enfant… Te voilà lancé dans la carrière… De l’ordre maintenant, de la conduite, du travail, et nous arriverons à bien… Mais, reprit mon oncle avec un accent plus ferme, honnête ? toujours !… voulant nuire ? jamais ! prenant garde qu’une jeune fille,… c’est sacré !… excepté pour les méchants.

— Je ne comprends pas, bon oncle ! m’écriai-je avec émotion.

— Cette jeune fille,… là-haut ?