Page:Topffer - Nouvelles genevoises.djvu/228

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qui se fera votre fils !… Monsieur, je suis plus embarrassée que vous à parler… Je vous connais peu… Je sais votre demande, et je ne sais pas votre caractère… Je vois beaucoup d’hommes qui passent pour des époux recommandables, et dont je ne ferais pas d’estime… Et puis, quitter mes parents !… Ici la voix de Henriette s’altéra, et ses larmes coulèrent.

— Non ! sans les quitter, sans les quitter jamais, mademoiselle, si du moins ils voulaient m’accueillir…

— Je leur appartiens, monsieur Jules, reprit Henriette avec plus de calme. Je n’ai pas d’expérience, et ils en ont. Je ne vous repousse point ; qu’ils décident, je serai ce qu’ils veulent que je sois…




Dans ce moment la porte s’ouvrit.

— Je ne vous cherchais pas ici ! dit le géomètre en s’adressant à moi. Au surplus, restez ; j’allais vous faire venir.

— Bonjour, ma chère enfant, dit mon oncle Tom en prenant la main de Henriette pour la baiser. Puis se tournant vers la mère : — Et vous, chère madame, courage, courage !… Si vous connaissiez ainsi que moi ce garçon-là depuis vingt-un ans, vous auriez confiance,… comme moi j’ai confiance et plaisir à le voir rechercher cette charmante personne, qui est un vrai joyau… Mais laissons parler celui à qui il appartient.

Mon oncle s’assit ; je demeurai debout auprès de Henriette, et nous écoutâmes le géomètre.

— À dix heures, dit-il, j’ai reçu monsieur Tom. Je rends justice, monsieur Jules, à la sincérité de vos sentiments et à l’honnêteté de vos vues. Mais vous avez un caractère faible, vacillant, timide, là où il convient