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produits, ce qui suppose que le propriétaire fasse l’avance et des semences et du salaire des ouvriers jusqu’après la récolte.

Mais cette première manière a l’inconvénient d’exiger beaucoup de travail et d’assiduité de la part du propriétaire, qui seul peut conduire les ouvriers dans leurs travaux, veiller sur l’emploi de leur temps et sur leur fidélité à ne rien détourner des produits.

Il est vrai qu’il peut aussi salarier un homme plus intelligent et dont il connaisse la fidélité, qui en qualité de régisseur ou de conducteur dirige les ouvriers et fasse le compte des produits ; mais il sera toujours exposé à être trompé.

D’ailleurs cette méthode est extrêmement dispendieuse, à moins qu’une grande population et le défaut d’emploi dans les autres genres de travail ne force les ouvriers à se contenter de salaires très-bas.

§ XXI. — Seconde manière : culture par esclaves.

Dans les temps voisins de l’origine des sociétés, il était à peu près impossible de trouver des hommes qui voulussent travailler le terrain d’autrui, parce que tous les terrains n’étant pas encore occupés, ceux qui veulent travailler préfèrent de défricher de nouvelles terres et de les cultiver pour leur propre compte. — Aussi n’est-ce pas dans l’origine des sociétés que les propriétaires peuvent cesser d’être cultivateurs ; c’est, comme nous l’avons fait voir plus haut (§ XI et suivants), seulement lorsque les progrès de la société et de la culture ont fait naître et bien distinguer la classe stipendiée.

Mais lors des premiers temps d’ignorance et de férocité, il y a eu beaucoup d’occasions de querelles entre les hommes mal armés, timides, éprouvant des besoins, n’ayant pas de subsistance bien assurée, et par conséquent très-susceptibles d’appréhension et de haine réciproque ; car il est d’expérience qu’on ne se bat presque jamais que par faiblesse, par inquiétude, par la crainte bien ou mal fondée d’une privation ou d’un malheur qu’on regarde comme certains, et auxquels on préfère le hasard du combat. — On a longtemps massacré les vaincus sans pitié, comme font encore quelques sauvages d’Amérique.

    partout encourager la production des hommes ; le clergé, grand propriétaire, en avait fait une vertu chrétienne. — Croissez et multipliez, disait-il ; car multiplier les bras, c’est multiplier notre richesse. (Hte D.)