Page:Turgot - Œuvres de Turgot, éd. Eugène Daire, I.djvu/167

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non-seulement toutes ses avances, mais encore un profit suffisant pour le dédommager de ce que lui aurait valu son argent s’il l’avait employé en acquisition de fonds ; et, de plus, du salaire du à ses travaux, à ses soins, à ses risques, à son habileté même ; car sans doute, à profit égal, il aurait préféré vivre, sans aucune peine, du revenu d’une terre qu’il aurait pu acquérir avec le même capital. À mesure que ce capital lui rentre par la vente des ouvrages, il l’emploie à de nouveaux achats pour alimenter et soutenir sa fabrique par cette circulation continuelle : sur ses profits il vit, et met en réserve ce qu’il peut épargner pour accroître son capital et le verser dans son entreprise en augmentant la masse de ses avances, afin d’augmenter encore ses profits.

§ LXII. — Subdivision de la classe stipendiée industrieuse, en entrepreneurs capitalistes et simples ouvriers.

Toute la classe occupée à fournir aux différents besoins de la société l’immense variété des ouvrages de l’industrie se trouve donc, pour ainsi dire, subdivisée en deux ordres : le premier, celui des entrepreneurs manufacturiers, maîtres fabricants, tous possesseurs de gros capitaux, qu’ils font valoir en faisant travailler par le moyen de leurs avances ; et le second qui est composé de simples artisans, lesquels n’ont d’autre bien que leurs bras, qui n’avancent que leur travail journalier et n’ont de profit que leurs salaires.

§ LXIII. — Autre emploi des capitaux en avances des entreprises d’agriculture. Développements sur l’usage, la rentrée et les profits indispensables des capitaux dans les entreprises d’agriculture.

En parlant d’abord de l’emploi des capitaux dans les entreprises de fabrique, j’ai eu pour but de présenter un exemple plus sensible de la nécessité et de l’effet des grosses avances et de la marche de leur circulation ; mais j’ai un peu renversé l’ordre naturel, qui aurait demandé que j’eusse commencé par parler des entreprises de culture, qui ne se font aussi, ne s’étendent et ne deviennent profitables que par de grandes avances. — Ce sont des possesseurs de capitaux considérables qui, pour les faire valoir dans des entreprises d’agriculture, afferment les terres et en payent aux propriétaires de gros loyers, en se chargeant de faire toutes les avances de la culture. — Leur sort doit être le même que celui des entrepreneurs de fabriques : comme eux, ils doivent faire les premières avances de l’entreprise, se fournir de bestiaux, de chevaux, d’outils aratoires,