Page:Verhaeren - Les Villes tentaculaires, 1920.djvu/137

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Perdus en un fouillis dédalien d’amarres.

Son port est concassé de chocs et de fracas
Et de marteaux tonnant dans l’air leurs tintamarres.

Toute la mer va vers la ville !

Les flots qui voyagent comme les vents,
Les flots légers, les flots vivants,
Pour que la ville en feu l’absorbe et le respire
Lui rapportent le monde en des navires.
Les orients et les midis tanguent vers elle
Et les Nords blancs et la folie universelle
Et tous nombres dont le désir prévoit la somme.
Et tout ce qui s’invente et tout ce que les hommes
Tirent de leurs cerveaux puissants et volcaniques
Tend vers elle, cingle vers elle et vers ses luttes :
Elle est la ville en rut des humaines disputes,
Elle est la ville au clair des richesses uniques
Et les marins naïfs peignent son caducée
Sur leur peau rousse et crevassée,
À l’heure où l’ombre emplit les soirs océaniques.