Page:Verne - Histoire des grands voyages et des grands voyageurs, Hetzel, 1870, tome 1.djvu/161

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profit et surprendre la bonne foi de Jean de Béthencourt ; mais il avait compté sans un certain Courtille, trompette de Gadifer, qui se trouvait avec lui. Ce brave soldat dénonça les fourberies de Berneval, et, sur sa dénonciation, ces fourbes furent enfermés dans la prison de Cadix. Courtille fit connaître aussi la situation des Canariens retenus à bord. Le chevalier normand, ne pouvant quitter Séville au moment où il allait obtenir une audience du roi, donna l’ordre que ces insulaires fussent traités avec égards. Mais, pendant ces pourparlers, le navire qui les portait fut conduit en Aragon, et là ces pauvres gens furent vendus comme esclaves.

Cependant, Jean de Béthencourt avait été introduit en présence du roi de Castille, et, après lui avoir raconté les résultats de son expédition : « Sire, dit-il, je viens vous demander secours, c’est qu’il vous plaise me donner congé de conquérir à la foi chrétienne des îles qui s’appellent les îles Canaries, et pour ce que vous êtes roi et seigneur de tout le pays à l’environ, et le plus proche roi chrétien, je suis venu requérant votre grâce qu’il vous plaise me recevoir à vous en faire hommage. »

Le roi, très-joyeux, reçut à hommage le chevalier normand. Il lui donna la seigneurie des îles Canaries, et en outre le cinquième des marchandises qui desdites îles viendraient en Espagne. De plus, il lui fit présent de vingt mille maravédis, environ quinze mille francs, pour acheter des approvisionnements destinés à ravitailler le gouverneur Gadifer, et il lui attribua le droit de battre monnaie au pays de Canarie.