Page:Verne - Histoire des grands voyages et des grands voyageurs, Hetzel, 1870, tome 1.djvu/306

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Une horrible tempête s’éleva, des vagues hautes comme des montagnes fondirent sur les navires, tandis que le vent soufflait avec rage et que la pluie tombait sans discontinuer. Lorsque le soleil parvenait à percer l’épais rideau de nuages qui interceptait presque complètement sa lumière, c’était pour éclairer un horrible tableau. La mer paraissait noire et bourbeuse, de grandes taches d’un blanc livide en marbraient les vagues aux crêtes écumeuses, et, pendant la nuit, des lueurs phosphorescentes zébrant l’immense plaine humide, marquaient d’une traînée de feu le sillage des navires.

Durant vingt-deux jours, sans trêve ni merci, les éléments en fureur battirent les navires portugais. Les matelots épouvantés, arrivés au comble de la prostration, après avoir vainement épuisé leurs prières et leurs vœux, n’obéissaient plus que par habitude aux commandements de leurs officiers. Ils avaient fait dès le premier jour le sacrifice de leur vie et s’attendaient à tout moment à être submergés.

Lorsque la lumière revint enfin, lorsque les flots se calmèrent, chaque équipage, croyant être le seul à survivre, jeta les yeux sur la mer et chercha ses compagnons. Trois navires se retrouvèrent avec une joie que vint bien vite abattre la triste réalité. Huit bâtiments manquaient. Quatre, avaient été engloutis corps et biens par une trombe gigantesque pendant les derniers jours de la tempête. L’un d’eux était commandé par Bartholomeu Dias, qui, le premier, avait découvert le cap de Bonne-Espérance ; Il avait été submergé par ces flots meur-