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LE RAYON-VERT.

V

d’un bateau à l’autre


Après le repas, demi-froid, demi-chaud, — un excellent déjeuner à la mode anglaise, qui fut servi dans le « dining-room » du Columbia, — miss Campbell et les frères Melvill remontèrent sur le pont.

Helena ne put retenir un cri de désappointement, lorsqu’elle eut repris sa place sur le spardeck.

« Et mon horizon ! » dit-elle.

Il faut bien en convenir, son horizon n’était plus là. Il avait disparu depuis quelques minutes. Le steamer, cap au nord, remontait en ce moment le long détroit des Kyles of Bute.

« C’est mal, cela, oncle Sam ! dit miss Campbell, avec une petite moue de reproche.

— Mais, ma chère fille…

— Je m’en souviendrai, oncle Sib ! »

Les deux frères ne savaient que répondre, et pourtant, on ne pouvait s’en prendre à eux si le Columbia, après avoir modifié sa direction, pointait alors dans le nord-ouest.

En effet, il y a deux routes très différentes pour aller de Glasgow à Oban par mer.

L’une, — celle que n’avait pas suivie le Columbia, — est la plus longue. Après avoir fait escale à Rothesay, le chef lieu de l’île de Bute, dominée par son vieux château du onzième siècle, encadrée à l’ouest de hauts glens qui la défendent des mauvais vents du large, le steamer peut continuer à descendre le golfe de Clyde, puis longer le littoral est de l’île, passer en vue de la grande et de la petite Cumbray, et s’avancer en cette direction jusqu’à la partie méridionale de l’île d’Arran, qui appartient presque tout entière au duc d’Hamilton, depuis la base de ses roches jusqu’à la cime du Goatfell, à près de huit cents mètres au-dessus du niveau de la mer. Alors le timonier donne un coup de barre, la