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sus aux pirates de l’archipel !

côte orientale, et, vers six heures et demie du soir, elle attaquait la pointe de Thiaki, l’ancienne Ithaque.

Cette île, de huit lieues de long sur une lieue et demie de large, singulièrement rocheuse, superbement sauvage, riche de l’huile et du vin qu’elle produit en abondance, compte une dizaine de mille habitants. Sans histoire personnelle, elle a pourtant laissé un nom célèbre dans l’antiquité. Ce fut la patrie d’Ulysse et de Pénélope, dont les souvenirs se retrouvent encore sur les sommets de l’Anogi, dans les profondeurs de la caverne du mont Saint-Étienne, au milieu des ruines du mont Œtos, à travers les campagnes d’Eumée, au pied de ce rocher des Corbeaux, sur lequel durent s’écouler les poétiques eaux de la fontaine d’Aréthuse.

À la nuit tombante, la terre du fils de Laërte avait peu à peu disparu dans l’ombre, une quinzaine de lieues au delà du dernier promontoire de Céphalonie. Pendant la nuit, la Karysta, prenant un peu le large, afin d’éviter l’étroite passe qui sépare la pointe nord d’Ithaque de la pointe sud de Sainte-Maure, prolongea, à deux milles au plus de son rivage, la côte orientale de cette île.

On aurait pu vaguement apercevoir, à la clarté de la lune, une sorte de falaise blanchâtre, dominant la mer de cent quatre-vingts pieds : c’était le Saut de Leucade,