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l’archipel en feu.

elle en ligne de bataille — deux des bricks au milieu de la ligne, et les deux autres à chaque extrémité. Ils manœuvraient de manière à tourner la corvette par l’avant et par l’arrière, afin de l’envelopper dans une circonférence, dont le rayon diminuerait peu à peu. Leur but était évidemment de l’écraser d’abord sous des feux convergents, puis de l’enlever à l’abordage.

Henry d’Albaret avait bien compris cette manœuvre, si périlleuse pour lui, et il ne pouvait l’empêcher, puisqu’il était condamné à l’immobilité. Mais peut-être parviendrait-il à briser cette ligne à coups de canon, avant qu’elle ne l’eût enveloppé de toutes parts. Déjà, même, les officiers se demandaient pourquoi leur commandant, de cette voix ferme et calme qu’on lui connaissait, n’envoyait pas l’ordre d’ouvrir le feu.

Non ! Henry d’Albaret entendait ne frapper qu’à coup sûr, et il voulait se laisser approcher à bonne portée.

Dix minutes s’écoulèrent encore. Tous attendaient, les pointeurs, l’œil à la culasse de leurs canons, les officiers de la batterie, prêts à transmettre les ordres du commandant, les matelots du pont jetant un regard par dessus les pavois. Les premières bordées ne viendraient-elles pas de l’ennemi, maintenant que