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le pays des fourrures.

« Ce n’est certainement point un Esquimau, dit le lieutenant.

— Ni un Indien ! s’écria le caporal Joliffe.

— Non ! c’est un Français ! » dit tranquillement le sergent Long.

Et, de l’avis de tous, il n’y avait qu’un Français qui eût été capable de danser en un tel point du globe !


CHAPITRE XII.

le soleil de minuit.


Cette affirmation du sergent Long n’était-elle pas peut-être un peu hasardée ? On avait dansé, c’était un fait évident, mais, quelle que soit sa légèreté, pouvait-on en conclure que seul, un Français avait pu exécuter cette danse ?

Cependant, le lieutenant Jasper Hobson partagea l’opinion de son sergent, — opinion que personne, d’ailleurs, ne trouva trop affirmative. Et tous tinrent pour certain qu’une troupe de voyageurs, dans laquelle on comptait au moins un compatriote de Vestris, avait séjourné récemment en cet endroit.

On le comprend, cette découverte ne satisfit pas le lieutenant. Jasper Hobson dut craindre d’avoir été devancé par des concurrents sur les territoires du nord-ouest de l’Amérique anglaise, et, si secret que la Compagnie eût tenu son projet, il avait été sans doute divulgué dans les centres commerciaux du Canada ou des États de l’Union.

Lors donc qu’il reprit sa marche un instant interrompue, le lieutenant parut singulièrement soucieux ; mais, à ce point de son voyage, il ne pouvait songer à revenir sur ses pas.

Après cet incident, Mrs. Paulina Barnett fut naturellement amenée à lui faire cette question :

« Mais, monsieur Jasper, on rencontre donc encore des Français sur les territoires du continent arctique ?

— Oui, madame, répondit Jasper Hobson, ou sinon des Français, du moins, ce qui est à peu près la même chose, des Canadiens, qui descendent des anciens maîtres du Canada, au temps où le Canada appartenait à la France, — et, à vrai dire, ces gens-là sont nos plus redoutables rivaux.

— Je croyais, cependant, reprit la voyageuse, que, depuis qu’elle avait