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le pays des fourrures.

véhicules, fort primitifs, consistaient en un assemblage solide de planches légères que liaient entre elles des bandes transversales. Un appendice, formé d’une pièce de bois cintrée et relevée comme l’extrémité d’un patin, permettait au traîneau de fendre la neige sans s’y engager profondément. Six chiens, attelés deux par deux, servaient de moteurs à chaque traîneau, — moteurs intelligents et rapides qui, sous la longue lanière du guide, peuvent franchir jusqu’à quinze milles à l’heure.

La garde-robe des voyageurs se composait de vêtements en peau de renne, doublés intérieurement d’épaisses fourrures. Tous portaient des tissus de laine, destinés à les garantir contre les brusques changements de température, qui sont fréquents sous cette latitude. Chacun, officier ou soldat, femme ou homme, était chaussé de ces bottes en cuir de phoque, cousues de nerfs, que les indigènes fabriquent avec une habileté sans pareille. Ces chaussures sont absolument imperméables et se prêtent à la marche par la souplesse de leurs articulations. À leurs semelles pouvaient s’adapter des raquettes en bois de pin, longues de trois à quatre pieds, sortes d’appareils propres à supporter le poids d’un homme sur la neige la plus friable et qui permettent de se déplacer avec une extrême vitesse, ainsi que font les patineurs sur les surfaces glacées. Des bonnets de fourrure, des ceintures de peau de daim complétaient l’accoutrement.

En fait d’armes, le lieutenant Hobson emportait, avec des munitions en quantité suffisante, les mousquetons réglementaires délivrés par la Compagnie, des pistolets et quelques sabres d’ordonnance ; en fait d’outils, des haches, des scies, des herminettes et autres instruments nécessaires au charpentage ; en fait d’ustensiles, tout ce que nécessitait l’établissement d’une factorerie dans de telles conditions, entre autres un poêle, un fourneau de fonte, deux pompes à air destinées à la ventilation, un halkett-boat, sorte de canot en caoutchouc que l’on gonfle au moment où on veut en faire usage.

Quant aux approvisionnements, on pouvait compter sur les chasseurs du détachement. Quelques-uns de ces soldats étaient d’habiles traqueurs de gibier, et les rennes ne manquent pas dans les régions polaires. Des tribus entières d’Indiens ou d’Esquimaux, privées de pain ou de tout autre aliment, se nourrissent exclusivement de cette venaison, qui est à la fois abondante et savoureuse. Cependant, comme il fallait compter avec les retards inévitables et les difficultés de toutes sortes, une certaine quantité de vivres dut être emportée. C’était de la viande de bison, d’élan, de daim, ramassée dans de longues battues faites au sud du lac, du « corn-beef », qui pouvait se conserver indéfiniment, des préparations indiennes dans