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LE PILOTE DU DANUBE.

naire, introduisit la clef dans la serrure.

Moins avancé que son geôlier, Serge Ladko n’avait même pas le choix entre plusieurs explications de son aventure. Le mystère lui en paraissait toujours aussi impénétrable, et il avait renoncé à imaginer des conjectures sur les motifs que l’on pouvait avoir de le séquestrer.

Quand, après un fiévreux sommeil, il s’était réveillé au fond de son cachot, la première sensation qu’il éprouva fut celle de la faim. Plus de vingt-quatre heures s’étaient alors écoulées depuis son dernier repas, et la nature ne perd jamais ses droits, quelle que soit la violence de nos émotions.

Il patienta d’abord, puis, la sensation devenant de plus en plus impérieuse, il perdit le beau calme qui l’avait soutenu jusque-là. Allait-on le laisser mourir d’inanition ? Il appela. Personne ne répondit. Il appela plus fort. Même résultat. Il s’égosilla enfin en hurlements furieux, sans obtenir plus de succès.

Exaspéré, il s’efforça de briser ses liens. Mais ceux-ci étaient solides et c’est en vain qu’il se roula sur le parquet en tendant ses muscles à les rompre.

Dans un de ces mouvements convulsifs, son visage heurta un objet déposé près de lui. Le besoin affine les sens. Serge Ladko reconnut immédiatement du pain et un morceau de lard qu’on avait sans doute mis là pendant son sommeil. Profiter de cette attention de ses geôliers n’était pas