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LE PILOTE DU DANUBE.

Dix secondes tragiques passèrent, et soudain elle se détourna en poussant un cri de douleur. Ses deux compagnons se précipitèrent vers elle. Que lui était-il arrivé ? Rien de grave, affirma-t-elle, d’une voix tremblante, en s’efforçant de sourire. Elle venait de se tordre sottement le pied, voilà tout.

Tandis que Serge Ladko allait, sans être aperçu, se placer devant le barreau accusateur, mari, directeur et gardien s’empressèrent. Les deux premiers sortirent soutenant la prétendue blessée ; le troisième repoussa précipitamment les verrous. Serge Ladko était seul.

Quel élan de gratitude gonfla sa poitrine pour la douce créature qui avait eu pitié ! Grâce à elle, il était sauvé. Il lui devait la vie ; plus que la vie, la liberté.

Il était retombé, accablé, sur sa couchette. L’émotion avait été trop rude. Son cerveau vacillait sous ce dernier coup du sort.

Le reste du jour s’écoula sans autre incident, et neuf heures sonnèrent enfin aux horloges lointaines de la ville. La nuit était tout à fait venue. De gros nuages, roulant dans le ciel, en augmentaient l’obscurité.

Dans le couloir, un bruit grandissant annonçait l’approche d’une ronde. Arrivée devant la porte, elle fit halte. Un gardien appliqua son œil au guichet et se retira satisfait. Le prisonnier dormait, enfoncé jusqu’au menton sous sa couverture. La