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SERGE LADKO.

résultat. Il ne devait donc pas se hâter de revenir en Bulgarie, car son retour eût été un véritable suicide. On connaissait son rôle, on le guettait, jour et nuit, et il ne pourrait se montrer en ville sans être arrêté au premier pas. Arrêté étant, chez les Turcs, synonyme d’exécuté, il fallait donc que Ladko s’abstint de reparaître, jusqu’au moment où la révolte serait ouvertement proclamée, sous peine d’attirer les pires malheurs sur lui-même et sur sa femme, que l’on n’avait jusqu’ici nullement inquiétée.

Ce moment ne tarda pas à arriver. La Bulgarie se souleva au mois de mai, trop prématurément au gré du pilote qui augurait mal de cette précipitation.

Quelle que fût son opinion à cet égard, il devait courir au secours de son pays. Le train l’amena à Zombor, la dernière ville hongroise, proche du Danube, qui fût alors desservie par le chemin de fer. Là, il s’embarquerait et n’aurait plus qu’à s’abandonner au courant.

Les nouvelles qu’il trouva à Zombor le forcèrent à interrompre son voyage. Ses craintes n’étaient que trop justifiées. La révolution bulgare était écrasée dans l’œuf. Déjà la Turquie concentrait des troupes nombreuses dans un vaste triangle dont Roustchouk, Widdin et Sofia formaient les sommets, et sa main de fer s’appesantissait plus lourdement sur ces malheureuses contrées.