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maître du monde

système à tout prix. Que ce système fût appliqué à trois appareils ou à un seul capable de se mouvoir en des milieux si divers, il n’importait. Acquérir le moteur qui donnait de pareils résultats, s’assurer son exploitation en toute propriété, telle était l’affaire à conclure.

Évidemment, d’ailleurs, les autres États ne négligeraient rien pour devenir possesseurs d’un engin qui serait si précieux dans l’armée comme dans la marine. On comprend quels avantages en retirerait une nation sur terre et sur mer !… Comment empêcher ses effets destructeurs, puisqu’on ne pouvait l’atteindre !… Il fallait donc s’en rendre maître à coups de millions, et l’Amérique ne saurait faire des siens un meilleur usage.

Ainsi raisonnait le monde officiel et aussi le populaire. Les feuilles publiques s’épuisaient en articles sur ce palpitant sujet. Et, assurément, l’Europe ne resterait pas en arrière des États-Unis en de telles circonstances.

Mais, pour acheter l’invention, nécessité de retrouver l’inventeur, et là apparaissait la véritable difficulté. En vain avait-on fouillé le lac Kirdall et promené la sonde à travers ses eaux !… Y avait-il lieu d’en conclure que le sous-marin ne parcourait plus ses profondeurs ?… Dans ce cas, comment était-il parti ?… Il est vrai, comment était-il venu ?… Insoluble problème !… Et puis il ne se montrait nulle part, pas plus que l’automobile sur les routes de l’Union, pas plus que le bateau sur les parages américains !

Plusieurs fois, lors des visites que je faisais à M. Ward, nous avions causé de cette affaire, qui ne laissait pas de le préoccuper. Les agents continueraient-ils ou non des recherches jusque-là infructueuses ?…

Or, dans la matinée du 27 juin, voici que je fus mandé à l’Hôtel de la police, et, dès mon entrée dans son cabinet, M. Ward me dit :