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jacksonville.

ville de Dover. Cependant, malgré le froid et la neige, doublement menacé du côté de la terre par les quinze mille hommes du général Grant, du côté du fleuve par les canonnières du commodore Foot, ce fort tombait le 14 février au pouvoir des fédéraux avec toute une division sudiste, hommes et matériel.

C’était là un échec considérable pour les confédérés. L’effet produit par cette défaite fut immense. Comme conséquence immédiate, il allait amener la retraite du général Johnston, qui dut abandonner l’importante cité de Nashville sur le Cumberland. Les habitants, pris de panique, la quittèrent après lui, et, quelques jours après, ce fut aussi le sort de Columbus. Tout l’État du Kentucky était alors rentré sous la domination du gouvernement fédéral.

On imagine aisément avec quels sentiments de colère, avec quelles idées de vengeance, ces événements furent accueillis en Floride. Les autorités eussent été impuissantes à calmer le mouvement qui se propagea jusque dans les hameaux les plus lointains des comtés. Le péril grandissait, on peut le dire, d’heure en heure, pour quiconque ne partageait pas les opinions du Sud et ne s’associait pas à ses projets de résistance contre les armées fédérales. À Tallahassee, à Saint-Augustine, il y eut des troubles dont la répression ne laissa pas d’être difficile. Ce fut à Jacksonville, principalement, que le soulèvement de la populace menaça de dégénérer en actes de la plus inqualifiable violence.

Dans ces circonstances, on le comprend, la situation de Camdless-Bay allait devenir de plus en plus inquiétante. Cependant, avec son personnel qui lui était dévoué, James Burbank pourrait résister peut-être, du moins aux premières attaques qui seraient dirigées contre la plantation, bien qu’il fût très difficile, à cette époque, de se procurer des munitions et des armes en quantité suffisante. Mais, à Jacksonville, M. Stannard, directement menacé, avait lieu de craindre pour la sécurité de son habitation, pour sa fille, pour lui-même, pour tous les siens.

James Burbank, connaissant les dangers de cette situation, lui écrivit lettres sur lettres. Il lui envoya plusieurs messagers pour le prier de venir le rejoindre