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LES SUCCESSEURS D’ÆNÉSIDÈME. — AGRIPPA.

rhon, il conteste la légitimité de la connaissance sensible, et de l’opinion commune. Avec Ænésidème, il récuse la science. Avec Agrippa, s’élevant à un plus haut degré d’abstraction, il déclare impossible la vérité quelle qu’elle soit. C’est le dernier mot du scepticisme dialectique. Les successeurs d’Agrippa ne pourront que répéter, souvent en les affaiblissant, ses arguments. Les sceptiques modernes les reproduiront aussi, sans y rien ajouter d’essentiel.

Dans l’avenir, le scepticisme conservera soigneusement les thèses soutenues par ses fondateurs. Il n’y a peut-être pas dans l’histoire d’autre exemple d’une doctrine qui se soit développée avec une pareille continuité, et soit demeurée aussi fidèle à elle-même. À chaque étape, on y ajoute quelque chose, mais sans rien perdre de ce que les anciens ont acquis. S’il n’est pas de philosophie qui prodigue les arguments avec plus de profusion, il n’en est pas non plus qui se soit montrée plus avare des richesses acquises. Sous la forme nouvelle que nous allons lui voir prendre, nous retrouverons tous les arguments d’Ænésidème et d’Agrippa ; mais un autre élément s’y ajoutera : l’alliance du scepticisme avec la médecine leur donnera une signification et une physionomie nouvelles.