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MÉNODOTE ET SEXTUS EMPIRICUS.

vivacité et paraît même avoir pour lui peu d’estime[1]. Peut-être ne faut-il pas s’en rapporter trop facilement au témoignage d’un adversaire. Mais, à en croire Galien, Ménodote aurait été un médecin peu recommandable, ne voyant dans la médecine qu’un moyen d’arriver à la richesse ou à la gloire[2]. Ce qui paraît certain, c’est qu’il malmenait fort ses adversaires : il avait toujours, dit Galien[3], l’insulte à la bouche, aboyant comme un chien ou injuriant comme un bouffon. Ces procédés rappellent assez bien la manière de Timon.

Quels qu’aient été les défauts personnels de Ménodote, il a été un puissant esprit ; personne, dans l’antiquité, n’a eu un sentiment plus vif de ce que devait être la méthode des sciences de la nature. Nous montrerons plus loin[4] que c’est lui qui a a donné à la méthode empirique une précision et une rigueur inconnues jusqu’à lui. Ménodote, si nous ne nous trompons, a le premier étroitement uni l’empirisme et le scepticisme, et donné a cette dernière doctrine un sens et une portée toute nouvelle.

À Ménodote succéda Hérodote de Tarse. Fabricius[5] et Zeller[6] croient que cet Hérodote est le médecin du même nom dont Galien[7] parle à plusieurs reprises et qui vécut à Rome[8] Mais Diogène ne nous dit pas qu’Hérodote le sceptique ait été médecin. S’il l’a été, il appartenait[9] non à la secte empirique, mais à l’école pneumatique, ce qui a un certain intérêt, parce qu’Hérodote a été le maître de Sextus Empiricus. Le sceptique

  1. Il l’appelle (De ven. sect., IX, vol. XI, p. 277) κακὸς ὁ Μηνόδοτος
  2. De plac. Hippocr. et Platon., IX, vol. V, p. 751.
  3. Subfig. emp., 63 : « Menodotus, qui nunquam defecit ab injuria et bomolochia adversus medicos, vel manifeste latrans sicut canis, vel simpliciter injurians sicut homo qui est in platea, aut vituperans bomolochice, dicens eos drimymoros, et drimyleones, et deauratos, et multis aliis talibus nominibus nuncupans dogmaticos qui ante ipsum medicos et philosophos. »
  4. Ch. III.
  5. Bibloth. græc., 184.
  6. Op. cit., p. 6.
  7. Galen., vol. XIII, 788, 801 ; XI, 429, 430, 442.
  8. Galen., vol. VIII, 751.
  9. Galen., vol. XI, p. 432. Voir, sur ce point, Pappenheim, Lebensverhältnisse des Sext. Emp., p. 15, 30. Berlin, 1875.