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MÉNODOTE ET SEXTUS EMPIRICUS.

incompréhensibles. Les méthodiques, en s’attachant uniquement aux phénomènes, sans se préoccuper des choses cachées, soit pour les affirmer, soit pour les nier, s’accordent mieux avec les sceptiques.

Il est vrai que, dans un autre passage[1], il semble se contredire en affirmant que sceptiques et empiriques sont d’accord pour déclarer que les choses cachées sont incompréhensibles.

Pour résoudre ces difficultés, il n’est pas nécessaire de supposer, avec Pappenheim[2] qu’il n’y a, dans le second texte de Sextus, qu’une expression maladroite qui trahit sa pensée. Sextus a fort bien pu, sur un point qui n’intéresse après tout que la théorie de la connaissance, modifier les assertions des empiriques, et y apporter plus de réserves, sans cesser pour cela d’être empirique[3]. Nous trouverons dans l’exposition de la doctrine trop de preuves de la fidélité de Sextus à l’empirisme pour pouvoir douter qu’il ait bien mérité son surnom. Il convient d’ailleurs de remarquer[4] que, dans le second texte, il dit simplement que, d’après les empiriques et les sceptiques, les choses cachées ne sont pas comprises (μὴ καταλαμβάνεσθαι). C’est un simple fait qu’il constate, ce n’est pas une affirmation dogmatique qu’il soutient. Enfin, il est encore possible, comme l’a pensé Philippson[5], qu’il se soit exprimé comme il le fait dans Π. μαθ. simplement parce qu’il reproduisait un passage d’un écrivain antérieur.

Nous possédons trois ouvrages de Sextus : les Πυῤῥώνειος ὑποτυπώσεις, et, réunis à une époque récente sous le titre de Πρὸς μαθεματικούς, deux ouvrages, dirigés l’un contre les sciences en général, l’autre contre les philosophes dogmatiques. Ils forment onze livres, mais vraisemblablement il n’y en avait que dix à

  1. M., VIII, 191 : Οἱ μέν φασιν αὐτὰ (τὰ ἄδηλα) μὴ καταλαμβάνεσθαι ὥσπερ οἱ ἀπὸ τῆς ἐμπειρίας ἰατροὶ καὶ οἱ ἀπὸ τῆς Σκέψεως φιλόσοφοι…
  2. Op. cit., n. 36.
  3. Cf. Zeller, t. V, p. 40.
  4. Natorp, (p. 156) est du même avis.
  5. Op. cit., p. 62.