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MÉNODOTE ET SEXTUS EMPIRICUS.

lui, et de les avoir fortifiés de toutes les considérations historiques dont nous venons de parler[1].

Outre les livres d’Ænésidème, il est certain que Sextus a eu sous les yeux ceux d’un grand nombre d’autres philosophes. Nous ne saurions ici nous donner la tâche de rechercher toutes les sources auxquelles il a puisé : bornons-nous à indiquer quelques-unes de celles qu’il désigne lui-même, et qui intéressent particulièrement l’histoire du scepticisme,

Sextus cite trop souvent Timon, avec l’indication précise des ouvrages auxquels il fait des emprunts, pour qu’on puisse douter qu’il connût très exactement les ouvrages du sillographe. Il s’est de même inspiré des livres des académiciens, notamment de ceux de Clitomaque et d’Antiochus. Des pages entières, celles entre autres où il expose les arguments de Carnéade contre les Dieux, sont empruntées à Clitomaque, et la comparaison de ces textes avec ceux où Cicéron expose les mêmes idées ne laisse pas de doute sur l’exactitude du résumé qu’il nous donne. Il est même assez plaisant de l’entendre se plaindre[2] de la prolixité avec laquelle les académiciens ont développé l’Ἀντίρρησις. Le soin qu’il prend[3] d’indiquer partout le chapitre auquel il fait des emprunts nous rassure sur leur exactitude.

Parmi les écrivains qu’il ne cite guère, mais dont il s’est le plus inspiré, il faut certainement placer Ménodote : c’est le vrai maître de Sextus, s’il est vrai que son prédécesseur immédiat, Hérodote, ait été un médecin pneumatique, c’est-à-dire dogmatique. On verra plus loin, par l’exposition des doctrines, que le scepticisme de Sextus ne révoque en doute que les vérités métaphysiques, celles qui se démontrent dialectiquement. À la science abstraite et a priori des dogmatistes il veut substituer timi-

  1. Souvent Sextus semble indiquer qu’il emprunte ses arguments à quelque devancier, lorsque, par exemple, il dit : Τινὲς λέγουσι… (M., VIII, 32, 171 ; P., III, 183, etc.) Parfois, il semble qu’il ajoute lui-même un argument nouveau : M., VIII, 166 : Συνθείη τις λόγον τοιοῦτον… Cf. VIII, 194, 259, etc., et P., II, 204.
  2. M., IX, 1.
  3. M., VII, 201.