Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/14

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singulière à me grimer, ayant laissé quelques incertitudes sur mon âge, il ne sera pas superflu de déclarer ici que je vins au monde le 23 juillet 1775, dans une maison voisine de celle où, seize ans auparavant, était né Robespierre. C’était la nuit : la pluie tombait par torrents ; le tonnerre grondait ; une parente, qui cumulait les fonctions de sage-femme et de sybille, en conclut que ma carrière serait fort orageuse. Il y avait encore dans ce temps de bonnes gens qui croyaient aux présages : aujourd’hui qu’on est plus éclairé, combien d’hommes qui ne sont pas des commères, parieraient pour l’infaillibilité de Mademoiselle Lenormand !

Quoi qu’il en soit, il est à présumer que l’atmosphère ne se bouleversa pas tout exprès pour moi, et bien que le merveilleux soit parfois chose fort séduisante, je suis loin de penser que là-haut on ait pris garde à ma naissance. J’étais pourvu d’une constitution des plus robustes, l’étoffe n’y avait pas été épargnée ; aussi, dès que je parus, on m’eût pris pour un enfant de deux ans, et j’annonçais déjà ces formes athlétiques, cette structure colossale, qui depuis ont glacé d’effroi les coquins les plus intrépides et les plus vigoureux. La maison de mon père étant