Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/153

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indiquait le terme, Grouard ayant à son tour brûlé la politesse au concierge. L’issue de l’accusation dont je venais de triompher m’avait cependant fait concevoir quelque espoir, et je ne songeais nullement à m’évader, lorsque vint s’en offrir une occasion que je saisis pour ainsi dire instinctivement. Dans la chambre où l’on m’avait placé, se trouvaient des détenus de passage ; en venant en chercher deux un matin, pour les livrer à la correspondance, le concierge oublie de fermer la porte ; je m’en aperçois : descendre au rez-de-chaussée, tout examiner, est l’affaire d’un instant. Le jour ne faisait que paraître, et les détenus étant tous endormis, je n’avais rencontré personne sur l’escalier, personne à la porte non plus ; je la franchis, mais le concierge, qui boit l’absinthe dans un cabaret situé en face de la prison, m’aperçoit, et s’élance à ma poursuite, en criant à tue-tête : Arrête ! arrête ! Il avait beau crier, les rues étaient encore désertes, et l’espoir de la liberté me donnait des ailes. En quelques minutes, je fus hors de la vue du concierge, et bientôt j’arrivai dans une maison du quartier Saint-Sauveur, où j’étais bien sûr qu’on ne songerait pas à venir me relancer. Il fallait d’un autre côté quitter au plus vite Lille, où