Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/219

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tonnerie, puisqu’elles agissent indifféremment sur tous les êtres organisés. Pour l’ambition, pour le jeu, pour la galanterie, il est des termes fixés par la nature, mais la gourmandise ne connaît pas d’âge, et si l’appétit oppose parfois sa force d’inertie, on en est quitte pour s’émanciper par une indigestion. Cependant, les amphitryons s’étant évadés, pendant que Dragon dégustait le gigot, il fut cassé et relégué dans la cour des chiens : là, mis à la chaîne, privé de l’air libre qu’il respirait sur la plate-forme, inconsolable de sa faute, il dépérit de jour en jour, et finit par succomber aux remords, victime d’un moment de gourmandise et d’erreur.

Près du bâtiment dont je viens de parler, s’élève le bâtiment vieux, à peu près disposé de la même manière, et sous lequel on a pratiqué les cachots de sûreté, où l’on renferme les turbulents et les condamnés à mort. C’est dans un de ces cachots qu’a vécu quarante-trois ans celui des complices de Cartouche qui l’avait trahi pour obtenir cette commutation ! Pour jouir un instant du soleil, il contrefit plusieurs fois le mort avec tant de perfection, que lorsqu’il eut rendu le dernier soupir, deux jours se passèrent sans qu’on lui retirât son collier de fer. Un troisième