Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/368

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le soir aux intéressés, sans que personne, hors eux-mêmes, sût la cause de cette libéralité.

À Sens, Jossas me donna une autre comédie : il avait fait mander un nommé Sergent, qui tenait l’auberge de l’Écu ; en le voyant, cet homme donna des signes de la plus vive douleur : « Comment, s’écriait-il, les larmes aux yeux, vous ici, monsieur le marquis !… vous, le frère de mon ancien maître !… moi qui vous croyais retourné en Allemagne… Ah ! mon Dieu ! mon Dieu ! quel malheur ! » On devine que dans quelque expédition, Jossas se trouvant à Sens, s’était fait passer pour un émigré rentré clandestinement, et frère d’un comte chez lequel Sergent avait été cuisinier. Jossas lui expliqua comment, arrêté avec un passeport de fabrique, au moment où il tentait de repasser la frontière, il avait été condamné comme faussaire. Le brave aubergiste ne se borna pas à de stériles lamentations ; il fit servir au noble galérien un excellent dîner, dont je pris ma part avec un appétit qui contrastait avec ma fâcheuse position.

À part une furieuse bastonnade, distribuée à deux condamnés qui avaient voulu s’évader à Beaune, il ne nous arriva rien d’extraordinaire