Page:Vidocq - Mémoires - Tome 1.djvu/370

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midi jusqu’au soir ; la foule étant alors dissipée, Jossas lui détacha le lieutenant Thierry, qui revint bientôt avec un saucisson, dans lequel étaient cachés cinquante louis. J’appris que Jossas ayant fait la conquête de cette femme sous le titre de marquis, l’avait instruite par une lettre de sa condamnation, qu’il expliquait sans doute à peu près comme il l’avait fait pour l’aubergiste de Sens. Ces sortes d’intrigues, aujourd’hui fort rares, étaient très communes à cette époque, par suite des désordres de la révolution et de la désorganisation sociale qui en était le résultat. Ignorant le stratagème employé pour la tromper, cette dame voilée reparut le lendemain sur le quai pour y rester jusqu’au moment de notre départ. Jossas était enchanté : non seulement il remontait ses finances, mais il s’assurait encore un asile en cas d’évasion.

Nous approchions enfin du terme de notre navigation, lorsqu’à deux lieues du Pont-Saint-Esprit, nous fûmes surpris par un de ces orages si terribles sur le Rhône. Il était annoncé par les roulements lointains du tonnerre. Bientôt la pluie tomba par torrents ; des coups de vent comme on n’en éprouve que sous les tropiques,