Page:Vidocq - Mémoires - Tome 2.djvu/121

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lui n’avait de la franchise et de la loyauté.

Le lieutenant de Paulet était un des êtres les plus singuliers que j’eusse rencontrés : doué d’une constitution des plus robustes, très jeune encore, il l’avait usée dans des excès de tous genres ; c’était un de ces libertins qui, à force de prendre par anticipation des acomptes sur la vie, dévorent leur capital en herbe. Une tête ardente, des passions vives, une imagination exaltée, l’avaient de bonne heure poussé en avant. Il ne touchait pas à sa vingtième année et le délabrement de sa poitrine, accompagné d’un dépérissement général, l’avaient contraint de quitter l’arme de l’artillerie dans laquelle il était entré à dix-huit ans ; maintenant, ce pauvre garçon n’avait plus que le souffle, il était effrayant de maigreur ; deux grands yeux, dont la noirceur faisait ressortir la pâleur mélancolique de son teint, étaient en apparence tout ce qui avait survécu dans ce cadavre, où respirait cependant une âme de feu. Fleuriot n’ignorait pas que ses jours étaient comptés. Les oracles de la faculté lui avaient annoncé son arrêt de mort, et la certitude de sa fin prochaine lui avait suggéré une étrange résolution : voici ce qu’il me conta à ce sujet. « Je servais, me dit-il, dans le cinquième