Page:Vidocq - Mémoires - Tome 2.djvu/271

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tenter une fugue par la cour des Bons Pauvres. Autrefois le projet m’eût souri ; je ne le rejetai pas, mais j’en fis la critique en homme qui a étudié les localités, et de manière à me conserver cette prépondérance que me valaient mes succès réels, et ceux que l’on m’attribuait, je pourrais dire aussi ceux que je m’attribuais moi-même ; car dès qu’on vit avec des coquins, il y a toujours avantage à passer pour le plus scélérat et le plus adroit ; telle était aussi ma réputation très bien établie. Partout où l’on comptait quatre condamnés, il y en avait au moins trois qui avaient entendu parler de moi ; pas de fait extraordinaire depuis qu’il existait des galériens, qu’on ne rattachât à mon nom. J’étais le général à qui l’on fait honneur de toutes les actions des soldats : on ne citait pas les places que j’avais emportées d’assaut, mais il n’y avait pas de geôlier dont je ne pusse tromper la vigilance, pas de fers que je ne vinsse à bout de rompre, pas de muraille que je ne réussisse à percer. Je n’étais pas moins renommé par mon courage et mon habileté, et l’on avait l’opinion que j’étais capable de me dévouer en cas de besoin. À Brest, à Toulon, à Rochefort, à Anvers, partout enfin j’étais considéré parmi les voleurs comme le plus rusé