Page:Vidocq - Mémoires - Tome 3.djvu/15

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d’Oléron ou de Ré, où des chefs, choisis parmi ce qu’il y avait de plus brutal dans l’armée, les traitaient comme des nègres[1]. L’atrocité de cette mesure fut cause que plusieurs jeunes gens qui ne se souciaient pas d’être soumis à un semblable régime, offrirent à la police de devenir ses auxiliaires ; Coco-Lacour fut un des premiers à tenter cette voie de salut, la seule qui fût ouverte. On fit d’abord quelques difficultés de l’admettre ; mais à la fin, persuadé qu’un homme qui hantait les voleurs depuis sa plus tendre enfance était une excellente acquisition, le préfet consentit à l’inscrire sur le contrôle des agents secrets. Lacour avait pris l’engagement formel de devenir honnête homme, mais pou-

  1. Les bataillons coloniaux, à une époque où la France n’avait plus de colonies, étaient destinés à devenir les égoûts de notre armée de terre. Les officiers de ces corps étaient presque tous de méchants garnements déshonorés par leur inconduite, et moins faits pour porter l’épée que le bâton de l’argousin. Lorsque le despotisme impérial existait dans toute sa vigueur. les bataillons coloniaux se recrutèrent d’une foule de citoyens honorables ; militaires ou non, que les Fouché, les Rovigo, les Clarke, immolaient à leurs caprices ou à ceux du maître dont ils étaient les esclaves. Des généraux, des colonels, des adjudants-commandants, des magistrats, des prêtres, furent envoyés comme simples soldats dans les îles de Ré et d’Oléron. La police avait réuni dans cet exil bon nombre de royalistes et de patriotes à cheveux blancs, qu’elle soumettait à la même discipline que les voleurs réputés incorrigibles. Le commandant Latapie faisait marcher au pas les uns et les autres.