Page:Villiers de L'Isle-Adam - Nouveaux Contes cruels.djvu/236

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ches d’une seconde enfance, — est-ce donc une criminelle prière que de demander à Dieu… de lui faire miséricorde… jusqu’à le rappeler le plus tôt possible vers la lumière… vers la vie éternelle !…

La vieille femme, sans répondre, détourna la tête avec un frisson.

— C’est qu’en vérité me viennent des songeries… dangereuses ! continua Déborah Milton, de cette même voix douce, claire et traînante, et que je me contiens mal de m’enfuir d’ici, parfois, — pour bientôt revenir vous porter secours, ma mère ! vous offrir du feu et du pain ! Qu’importe le prix dont je les aurais payés !

— Tais-toi, Dieu le défend ! Gagner le salut par la foi, dans l’épreuve, et ne murmurer jamais : voilà tout ce qu’il faut.

— Mais… j’ai vingt ans, moi ! tu l’oublies peut-être un peu, mère.

— Demain… tu auras mon âge. Tu verras… si tu y parviens.