Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/12

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tendaient guère que les orages, en avaient étudié, au fond d’un spécial silence, les vibrations profondes. Si bien qu’aujourd’hui, tous, avec un ensemble, — que le terroir sonore et l’irradiation plongeante des sons rendaient inquiétant, — contrefaisaient, à s’y méprendre, le fracas de l’électricité dans l’étendue, la plainte des longues rafales, les ruissellements de l’averse au travers des feuilles.

Au grondement de cet interminable orage qui, dès l’aurore, commençait à rouler au-dessus de leurs têtes, les infortunés animaux qui peuplaient l’Île se retiraient, courbés, dolents et pleins d’effroi, chacun dans sa retraite, — en se secouant, même, s’imaginant être pénétrés jusqu’aux os par les pluies torrentielles, que, positivement, ils entendaient.

Quant à la vertu même de l’orage, à ce qui en anime la réalité, — quant à l’éclair, enfin, — les perroquets, par dédain sans doute, ne le reproduisaient pas. Ce détail leur paraissait une sorte de superfétation, dont leur art, plus sobre que son modèle, ne devait en rien se préoccuper. Oiseux leur semblait l’éclair, bien qu’ils n’eussent pas, au fond, d’opinion très précise à son égard : ils s’en passaient, voilà tout. Histoire de simplifier. — Bref, de la tempête ils ne daignaient démarquer que le vacarme et, satisfaits de leur tourmente postiche, ils eussent, à la rigueur, pu prétendre qu’ils égalaient les réelles, puisque, obtenant des « effets » pour ainsi dire analogues, leur tapage avait sur l’autre l’étourdissante supériorité de la permanence.