Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/133

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minant et d’une voix qu’il essayait en vain d’adoucir.

J’inclinai vaguement la tête pour lui complaire et briser là ; mais il reprit :

— Et, sans doute, alors, monsieur voyage dans le Midi… pour voir les curiosités ?

Nouveau mouvement de tête affirmatif, de ma part, mais, cette fois, en envisageant mon homme.

— Ah ?… dit-il. — Et bien ! je puis vous en montrer une, de curiosité, moi, monsieur, si vous voulez… et pas loin d’ici ! Et qui vaut la peine d’être vue ! Quant au salaire, ce que monsieur voudra.

Je l’avoue, j’étais pris par mon faible.

— Une curiosité !… Soit : voyons ! lui dis-je.

En un bond de plantigrade, et d’un air sournois, il s’en alla donner un tour de clef à la porte, s’en fut à son comptoir allumer une lanterne sourde, puis, taciturne, revint à moi, sa lueur à la main, me regardant. — Soudain il se baissa brusquement, saisit presque sous mes pieds, l’anneau d’une trappe de cave, souleva la planche et, m’indiquant de terreuses marches apparues :

— Descendons ! décréta-t-il : c’est là-dessous : ne me demandez pas ce que c’est, monsieur ! c’est une surprise.

Comme on le pense bien, je ne me le fis pas dire deux fois. — Une « curiosité » !… Chose trop rare, en vérité, pour se refuser à la rencontrer — peut-être !… Et puis, là-dessous ?… — Que diable pouvait-il y avoir ?