Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/265

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d’adultères s’étant, par délicatesse, constitué solidaire et garant de ses acolytes, ses mesures sont toujours prises, vingt-quatre heures avant chaque « séance », pour qu’il puisse, effectivement, répondre de son délégué. Car il soumet alors cet officieux Lovelace à l’ingestion d’un certain électuaire de famille, — élixir déclaré souverain par les Facultés, — et dont les propriétés bienfaisantes (noblesse oblige !) sont de rendre ses séides à ce point inoffensifs, incorruptibles, et, pour un temps, réfractaires aux plus innocentes effervescences, qu’après se l’être assimilé, ceux-ci pourraient, au besoin, doubler les Saint-Antoine sans désavantage apparent. — C’est une sorte de Léthé-chez-soi, qui ferait descendre à la température polaire le vif-argent du plus africain des caprices ! — Par ainsi, nul abus des situations n’est laissé loisible. C’est là le point d’honneur de la Maison. Et l’amant le plus ombrageux, après avoir confié, d’urgence, l’élue du cœur, à l’un de ces Tantales désassoiffés, peut dormir sur les deux oreilles.

Les convenances étant sauvegardées par cette ingénieuse formalité préalable (qui, d’ailleurs, s’imposait à titre d’exigible dans l’intérêt général), le monde admet tacitement, d’ores et déjà, l’entremise de ces tiers sans conséquence dans les divorces de distinction.

Toutes facilités donc, pour convoler désormais, indéfiniment, au gré de ses inclinations successives, sont offertes au public par l’agence du Chandelier d’Or. Quelques-unes de nos plus aimables libres-penseuses