Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/293

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— C’est que… Je n’ai pas encore d’hôtellerie pour cette nuit : je viens d’arriver, lui répondis-je.

— Tant mieux. Notre auberge est là-bas, sur la falaise, en vue de la mer. C’est cette haute maison isolée, à deux cents pas de nous. Vois-tu, nous aimons à tenir de l’œil nos bâtiments. Nous dînerons dans la salle basse avec des officiers de marine de mes amis et, sans doute, quelques autres échantillons de la flore féminine de Santander. L’hôte a du Jerez nouveau. Cela se boit, comme de l’eau claire, ce Jerez-des-Chevaliers !… Il faut s’y habituer, par exemple. — Marchons ! ajouta-t-il en enlaçant par la taille la jolie mulâtresse qui se laissa faire en nous regardant.

La nuit recevait les derniers adieux d’un vieux soleil magnifique.

Les îlots, au ras de l’horizon, semblaient des braises mouvantes. Le vent d’ouest, sur la plage, soufflait une âpre odeur marine. Nous nous hâtions sur la lumière rouge du sable. Catalina courait devant nous, essayant d’attraper, avec son tambour de basque, les papillons que les ombres tombantes chassaient des orangers vers l’Océan.

Et Vénus s’élevait, maintenant, dans le bleu pâle du ciel.

— Nous aurons une nuit sans lune, me dit M. de Villebreuse : c’est dommage ! Nous eussions promené par la ville : bah ! nous ferons mieux.

— Est-ce à toi cette si charmante fille ? lui demandai-je.