Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/303

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parmi la fumée, éblouissaient encore la chambre ! Et j’ouvris la porte, d’une main que, vraiment, l’égarement faisait tâtonner : l’enfant se laissa, toute pantelante, aller entre mes bras, sans cesser de considérer le dragon qui, nous voyant fuir, redoublait d’efforts et de sifflements horribles ! Je m’élançai, avec elle, dans le grand couloir, en tirant très vite et violemment la porte sur nous, — pendant qu’un terrifiant bruit d’armoire brisée et s’écroulant, — mêlé aux sinistres chocs des lourdes volutes de l’animal, se heurtant, monstre en furie, à travers la chambre où roulaient des meubles, — nous parvenait de l’intérieur.

Nous descendîmes avec la rapidité de l’éclair.

En bas, personne ! salle déserte : porte ouverte sur la falaise.

Sans perdre le temps en oiseux commentaires, nous nous précipitâmes au dehors.

Sur la grève, la mulâtresse, m’oubliant, s’enfuit, en une course éperdue, vers la ville.

La voyant hors de danger, je pris mon vol vers la rade, dont les falots luisaient là-bas, m’imaginant que l’effrayant animal roulait ses anneaux le long de la plage, sur mes talons, et allait m’atteindre d’un moment à l’autre.

En quelques minutes, ayant ressaisi ma valise à bord du Véloce, je courus à l’embarcadère du steamer La Vigilante, dont sonnait la cloche de départ pour la France.

Trois jours après, de retour en ma chère et tranquille maison des bords de la Marne, les pieds dans mes