Page:Villiers de L’Isle-Adam - Derniers Contes, 1909.djvu/387

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ta stérile vieillesse, tu n’aies agi dans l’inconscience… et, devant la perfection de leur double supplice, comment le croire ?

« Ainsi, ce ne fut qu’avec des paroles, n’est-ce pas ? rien qu’avec des paroles, que tu fis subir, à leurs âmes, une mystérieuse agonie, jusqu’à ce qu’enfin cette mort volontaire, où tu les persuadais de se réfugier contre leurs souffrances, vint les délivrer… de t’avoir entendu !

« Oui, tout l’ensemble de ce subtil forfait, je le devine, prêtre : — et c’est par dédain, sache-le, que je n’envoie pas, à l’instant même, ta tête sonner et bondir sur ces dalles profanées par ton parjure. »

Akëdysséril, qui venait de laisser ses yeux étinceler, reprit, avec des accents amers :

— « Aussitôt que l’austérité de ton aspect eut séduit la foi de ces claires âmes, tu commenças cette œuvre maudite. Et ce fut la simplicité de leur mutuelle tendresse que tu pris, d’abord, à tâche de détruire. Au souffle de quelles obscures suggestions desséchas-tu la sève d’amour en ces jeunes tiges, qui, pâlissantes, commencèrent, dès lors, à dépérir pour ta joie, — je vais te le dire !

« Vieillard, il te fallut que chacun d’eux se sentît solitaire ! Eh bien, — selon ce que tu leur laissas entendre, — chacun d’eux ne devait-il pas survivre à l’oublié, et régner, grâce à mes vœux, en des pays lointains, — aux côtés d’un être royal et plein d’amour aujourd’hui préféré déjà ?… Comment te fut-il possible de les persuader ? — Mais tu