Page:Villiers de L’Isle-Adam - Isis, 1862.djvu/187

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lement impressionnée. Elle agissait dans la mesure des forces dont elle disposait : si peu que ce fût, c’était ce qu’il lui était bien permis de faire. Était-ce donc sa faute si les douleurs mêmes ne pouvaient troubler son âme ?

Elle avait accepté de remplir ce métier mystérieux dans Florence, malgré les deux asiles qu’elle avait encore établis en Toscane sous un autre nom que le sien. Elle semblait s’être créé le passe-temps original de supprimer quelque chose, ne fût-ce qu’un rien, dans l’universel malheur ! Sa constance, à ce sujet, ne se décourageait et ne se dégoûtait jamais dans l’occasion. C’était une façon d’attendre ce qu’elle attendait.

Sa main ne tremblait pas plus en tenant le scalpel que le livre ou que l’épée, et il lui paraissait sans doute aussi naturel d’écrire, auprès d’un grabat, la formule des drogues étranges qui soulagent les tourments et retardent l’agonie, que d’écrire une ode en vers saphiques sur l’inconstance des passions.

En ceci, Tullia Fabriana ne cessait pas d’être grande et impassible.