Page:Villiers de L’Isle-Adam - Isis, 1862.djvu/47

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minue la volonté et le respect de son but, quand bien même votre ami serait l’idéal des amis. Croyez, mon cher enfant, qu’il m’a fallu bien souvent l’expérimenter, pour le croire ! Parlez de choses indifférentes, laissez dire, et ne craignez pas de rendre service au premier venu, eussiez-vous été affligé vingt fois de l’avoir fait. — Si vous recevez des avances, et l’on vous en fera, du courage ! Contraignez votre bon cœur ! Recevez-les froidement ; pas de confidences ni d’expansion d’aucun genre, ou vous serez moins estimé demain. Ah ! cela est dur à votre âge ; je le sais ; mais il faut choisir entre une destinée obscure ou glorieuse, et, le choix fait, garder une volonté de fer sur laquelle un instant d’oubli ne puisse mordre. Un homme qui risque un avenir pour le divertissement de parler une minute, doute de lui-même à cette minute et par conséquent ne mérite pas de réussir. Le monde est à l’homme assez concentré, assez maître de sa volonté et de sa pensée, pour agir sans répondre aux autres hommes autre chose que « oui » ou « non » indifféremment, toute sa vie. — Ne craignez pas de vous faire des ennemis, s’il le