Page:Villiers de L’Isle-Adam - Isis, 1862.djvu/68

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tente, ainsi la phrase d’un homme qui eût peut-être admiré le lendemain, selon l’humeur du moment, ce qu’il chargeait la veille de dérision, s’en va détruire le recueillement d’un bon nombre des condamnés à mort qui l’entendent, et qui, se prenant au sérieux, prennent la parole de ce faux-frère au sérieux. Et alors la propagande recommence de plus belle !… Triste origine du doute.

« En somme, la contraction des rictus vénérables d’un million de braves hilares qui, sous prétexte d’illusions perdues, passent exprès la durée majeure de leur carrière à ne rien voir nulle part, constitue-t-elle un acte de présence suffisant pour qu’il leur soit décerné un valable droit de décision dans les questions profondes ? Ont-ils bien réellement formulé, par cette grimace arbitraire, la dernière expression de la philosophie ? C’est au moins douteux, puisque la philosophie les comprend, au fond de ses déductions inférieures, et que, d’après eux-mêmes, ils tirent précisément leur bonne grosse gloire de ce qu’ils ne la comprennent pas.

« Donc, puisqu’ils sont comme s’ils n’étaient pas,