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Pour toi, près l’Auxerrois, pendant quarante hivers,
Bois, parmi les douceurs d’une agréable vie,
Un peu plus d’hypocras, un peu moins d’eau-de-vie.




ÉPÎTRE VIII.


À MONSIEUR LE PRINCE EUGÈNE.


(1716)


Grand prince, qui, dans cette cour
Où la justice était éteinte,
Sûtes inspirer de l’amour,
Même en nous donnant de la crainte ;
Vous que Rousseau si dignement
A, dit-on, chanté sur sa lyre[1],
Eugène, je ne sais comment
Je m’y prendrai pour vous écrire.
Oh ! que nos Français sont contents
De votre dernière victoire[2] !
Et qu’ils chérissent votre gloire,
Quand ce n’est pas à leurs dépens !
Poursuivez ; des musulmans
Rompez bientôt la barrière ;
Faites mordre la poussière
Aux circoncis insolents ;
Et, plein d’une ardeur guerrière,
Foulant aux pieds les turbans,
Achevez cette carrière
Au sérail des Ottomans :
Des chrétiens et des amants
Arborez-y la bannière,
Vénus et le dieu des combats
Vont vous en ouvrir la porte ;

  1. Voyez les odes de Rousseau, livre III, ode i.
  2. La bataille de Petervaradin, gagnée contre les Turcs, en 1716. (K.)