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SOMMAIRES DES PIÈCES DE MOLIÈRE.


L’AMOUR MÉDECIN,


Petite comédie en un acte et en prose, représentée à Versailles le 15 septembre 1665
et sur le théâtre du Palais-Royal le 22 du même mois.


L’Amour médecin est un impromptu fait pour le roi en cinq jours de temps : cependant cette petite pièce est d’un meilleur comique que le Mariage forcé ; elle fut accompagnée d’un prologue en musique, qui est l’une des premières compositions de Lulli.

C’est le premier ouvrage dans lequel Molière ait joué les médecins. Ils étaient fort différents de ceux d’aujourd’hui ; ils allaient presque toujours en robe et en rabat, et consultaient en latin.

Si les médecins de notre temps ne connaissent pas mieux la nature, ils connaissent mieux le monde, et savent que le grand art d’un médecin est l’art de plaire. Molière peut avoir contribué à leur ôter leur pédanterie ; mais les mœurs du siècle, qui ont changé en tout, y ont contribué davantage. L’esprit de raison s’est introduit dans toutes les sciences, et la politesse dans toutes les conditions.


LE MISANTHROPE,


Comédie en vers et en cinq actes, représentée sur le théâtre du Palais-Royal
le 4 juin 1666.


L’Europe regarde cet ouvrage comme le chef-d’œuvre du haut comique. Le sujet du Misanthrope a réussi chez toutes les nations longtemps avant Molière, et après lui. En effet, il y a peu de choses plus attachantes qu’un homme qui hait le genre humain, dont il a éprouvé les noirceurs, et qui est entouré de flatteurs dont la complaisance servile fait un contraste avec son inflexibilité. Cette façon de traiter le Misanthrope est la plus commune, la plus naturelle, et la plus susceptible du genre comique. Celle dont Molière l’a traité est bien plus délicate, et, fournissant bien moins, exigeait beaucoup d’art. Il s’est fait à lui-même un sujet stérile, privé d’action, dénué d’intérêt. Son Misanthrope hait les hommes encore plus par humeur que par raison. Il n’y a d’intrigue dans la pièce que ce qu’il en faut pour faire sortir les caractères, mais peut-être pas assez pour attacher ; en récompense, tous ces caractères ont une force, une vérité et une finesse que jamais auteur comique n’a connues comme lui.

Molière est le premier qui ait su tourner en scènes ces conver-