Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome31.djvu/101

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en exil à Toulouse : il ne les tua pas mais son fils l’empereur Constantin II, en tua deux. Pour son neveu Lucinien il ne le manqua pas : il le fit assassiner à l’âge de douze ans Son beau frère Lucinius, il le fit étrangler après avoir dîné avec lui dans Nicomédie et lui avoir fait le serment de le traiter en frère. Son autre beau frère Bassien, il était déjà expédié avant Licinius. Son beau père Maximien-Hercule, ce fut le premier dont il se défit à Marseille, sur le prétexte spécieux que ce beau-père, accablé de vieillesse, venait l’assassiner dans son lit. Mais il faut bien pardonner cette multitude de fratricides et de parricides à un homme qui tint le concile de Nicée, et qui d’ailleurs passait ses jours dans la mollesse la plus voluptueuse. Comment ne pas le révérer, après que Jésus-Christ lui-même lui envoya un étendard dans les nuées ; après que l’Église l’a mis au rang des saints, et qu’on célèbre encore sa fête le 21 mai chez les pauvres Grecs de Constantinople, et dans les églises russes ?

Avant d’examiner son concile de Nicée, il faut dire un mot de son fameux labarum, qui lui apparut dans le ciel. C’est une aventure très curieuse.


Chapitre XVII. Du « labarum »

Ce n’est pas ici le lieu de faire une histoire suivie et détaillée de Constantin, quoique les déclamations puériles d’Eusèbe, la partialité de Zonare et de Zosime, leur inexactitude, leurs contrariétés, et la foule de leurs insipides copistes, semblent exiger que la raison écrive enfin cette histoire, si longtemps défigurée par la démence et le pédantisme.

Nous n’avons ici d’autre objet que le labarum. C’était un signe militaire qui servait de ralliement, tandis que les aigles romaines étaient la principale enseigne de l’armée. Constantin s’étant fait proclamer césar chez nous par quelques cohortes, sortit vite de notre île pour aller disputer le trône à Maxence, fils de l’empereur Maximien-Hercule, encore vivant. Maxence avait été élu par le sénat romain, par les gardes prétoriennes, et par le peuple. Constantin leva une armée dans les Gaules. Il y avait dans cette armée un très grand nombre de chrétiens attachés à son père. Jésu-Christ, soit par reconnaissance, soit par politique, lui apparut, et lui montra en plein midi un nouveau labarum, placé