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Traité ſur la Tolérance. Chap. III.

aux Moines ; comme ils ne révéraient pas des reliques qu’on doit révérer, mais qui rapportaient encore davantage ; enfin, comme ils attaquaient des dogmes très-reſpectés,[1] on ne leur répondit d’abord qu’en

  1. Ils renouvellaient le ſentiment de Bérenger ſur l’Euchariſtie ; ils niaient qu’un corps pût être en cent mille endroits différents, même par la toute-puiſſance divine ; ils niaient que les attributs puſſent ſubſiſter ſans ſujet ; ils croyaient qu’il était abſolument impoſſible que ce qui eſt pain & vin aux yeux, au goût, à l’eſtomac, fût anéanti dans le moment même qu’il exiſte ; ils ſoutenaient toutes ces erreurs condamnées autrefois dans Bérenger. Ils ſe fondaient ſur pluſieurs paſſages des premiers Pères de l’Égliſe, & ſur-tout de St. Juſtin, qui dit expreſſément dans ſon Dialogue contre Typhon ; « L’oblation de fine farine eſt la figure de l’Euchariſtie, que Jésus-Christ nous ordonne de faire en mémoire de ſa Paſſion. » καὶ ἡ τῆς σεμιδάλεως, &c. τύπος ἦν τοῦ ἄρτου τῆς εὐχαριστίας, ὃν εἰς ἀνάμνησιν τοῦ πάθους, &c. Ἰησοῦς Χριστὸς ὁ κύριος ἡμῶν παρέδωκε ποιεῖν.

    Ils rappellaient tout ce qu’on avait dit dans les premiers ſiècles contre le culte des Reliques ; ils citaient ces paroles de Vigilantius : « Eſt-il néceſſaire que vous reſpectiez, ou même que vous adoriez une vile pouſſière ? Les ames des Martyrs aiment-elles encore leurs cendres ? Les coutumes des Idolâtres ſe ſont introduites dans l’Égliſe ; on commence à allumer des flambeaux en plein midi : nous pouvons pendant notre vie prier les uns pour les autres ; mais après la mort, à quoi fervent ces prières ? »

    Mais ils ne diſaient pas combien St. Jérôme s’était élevé contre ces paroles de Vigilantius. Enfin, ils voulaient tout rappeller aux temps Apoſtoliques, & ne vou-

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